Le CIR est-il réservé aux ingénieurs et aux chercheurs ?

Lorsqu’il s’agit de valoriser les ressources humaines mobilisées dans vos travaux de R&D pour constituer votre Crédit d’Impôt Recherche, la question qui revient toujours est la même : qui pouvez-vous vraiment déclarer ?

Pour certains profils, la réponse est évidente : salariés diplômés, chercheurs ou ingénieurs. Pour d’autres, pourtant essentiels à l’avancement technique du projet, la situation est moins simple : non diplômés, fondateurs non-salariés, chefs de projets techniques, stagiaires de haut niveau…

Voici une mise au point à jour des pratiques et contrôles en 2025 concernant la prise en compte de ces profils dans l’assiette du CIR.

Faisons un point sur la prise en charge de ces cas particuliers dans votre CIR :

Les ingénieurs non diplômés

Contrairement à une idée reçue encore répandue, l’absence de diplôme d’ingénieur ne rend absolument pas un profil inéligible au CIR.

La jurisprudence le confirme : ce qui compte, ce n’est pas le titre, mais la participation réelle à des travaux de recherche et la capacité à résoudre des verrous techniques ou scientifiques.

En 2025, cependant, l’administration demande désormais des preuves techniques contemporaines démontrant la compétence du collaborateur et la nature scientifique de son travail :

  • historique de commits ou tickets,
  • contributions à des prototypes, modèles ou expérimentations,
  • notes techniques, documentation interne ;

Ces éléments doivent permettre de justifier objectivement que la personne, même sans diplôme reconnu, dispose du niveau requis pour mener des travaux de R&D.

L’entreprise doit donc être en mesure d’expliquer clairement pourquoi elle considère ce collaborateur comme apte à conduire la recherche décrite.

Les CTO non salariés

Dans de nombreuses jeunes entreprises, le profil technique principal  (souvent le CTO ou l’un des cofondateurs) n’est pas encore rémunéré.

Même s’il ne génère aucune dépense éligible, il peut contribuer à justifier la dimension scientifique des travaux, à condition :

  • d’être associé ou d’avoir un intérêt direct dans l’entreprise,
  • d’être réellement impliqué dans la R&D,
  • et que son rôle scientifique soit documenté (revues de code, direction technique, arbitrages scientifiques, suivis méthodologiques…).

Il est important de rappeler qu’un profil externe (freelance, régie) qui n’est pas salarié et n’est pas associé ne peut pas être considéré comme une ressource interne dans le cadre du CIR.

Les chefs de projets et les ressources de « support »

Certains rôles ne réalisent pas directement l’expérimentation scientifique, mais participent de manière indispensable à l’avancement de la R&D :

  • chefs de projets techniques,
  • rédacteurs de spécifications techniques,
  • testeurs avancés,
  • experts métier apportant des connaissances essentielles à la résolution des verrous.

Leur valorisation reste possible, mais sous une condition stricte : ils doivent contribuer directement à la production des travaux de R&D, et non simplement gérer, coordonner ou accompagner.

Sont généralement éligibles (au prorata du temps passé) les activités telles que :

  • analyse technique permettant de poser les hypothèses de recherche,
  • participation aux choix d’architecture expérimentale,
  • définition de protocoles de tests avancés,
  • production de spécifications ou de tests nécessaires aux travaux scientifiques.

En revanche, les rôles purement organisationnels, de pilotage ou de gestion ne sont pas éligibles.

Les stagiaires

Les stagiaires demeurent souvent mal compris dans le cadre du CIR. Ils peuvent pourtant représenter une charge significative pour l’entreprise et contribuer aux travaux de recherche.

 

En 2025, un stagiaire peut être intégré dans l’assiette du CIR s’il remplit toutes les conditions suivantes :

  • il réalise un stage gratifié,
  • le stage prépare à un diplôme de niveau Master 2, ingénieur ou RNCP niveau 7,
  • et il participe effectivement à des travaux de R&D (et non à des tâches périphériques ou applicatives).

La durée n’a pas nécessairement besoin d’être de 6 mois : c’est le niveau du diplôme préparé et la nature réelle des travaux qui comptent.

Les dirigeants

Les dirigeants salariés, tout comme les gérants de SARL au statut TNS, peuvent être valorisés dans le CIR au prorata du temps qu’ils consacrent directement à la R&D.

Les dirigeants salariés comme les gérants en TNS peuvent être intégrés à l’assiette du CIR lorsqu’ils participent directement aux travaux de R&D.
Comme pour toutes les autres ressources, leur valorisation se fait au prorata du temps consacré aux travaux.

Pour que leur coût soit intégré dans le CIR, leur rémunération doit :

  • être versée directement par l’entreprise,
  • ou être versée dans le cadre d’une mise à disposition de personnel,
  • ou être facturée via une holding personnelle qui met le dirigeant à disposition de la société opérationnelle.

Dans le cas d’une holding personnelle, il s’agit d’une exception notable à la règle d’agrément applicable aux travaux externalisés : une holding qui facture sa filiale n’est pas considérée comme un sous-traitant classique nécessitant un agrément CIR.

Cependant, l’administration peut demander :

  • un contrat de mise à disposition,
  • des factures précises détaillant la nature R&D des interventions,
  • et la preuve concrète des travaux réalisés.

Ne sont pas valorisables :

  • dividendes,
  • stock-options,
  • actions gratuites,
  • tout mode de rémunération qui ne constitue pas une charge de personnel.

Les “activités indispensables” selon le Guide CIR 2025

Le Guide 2025 du CIR introduit désormais une définition précise de ce qu’est une activité indispensable à la réalisation d’une opération de R&D, utilisée comme grille d’analyse lors des échanges avec les experts.

Quatre critères cumulatifs permettent de déterminer si l’activité d’un collaborateur peut être intégrée :

  1. L’activité doit être effectuée dans le cadre d’une opération qui relève effectivement de la R&D.
  2. Elle doit être en lien direct avec l’objet scientifique ou technique de la recherche menée.
  3. Elle doit être réalisée par une personne disposant des compétences techniques nécessaires pour comprendre ou mener cette activité.
  4. Le résultat de cette activité ne doit pas déjà exister ou être directement accessible par ailleurs.

Cette analyse structure maintenant l’éligibilité de nombreux profils :

  • développeurs autodidactes (critère 3),
  • chefs de projets techniques contribuant aux hypothèses de recherche (critère 2),
  • stagiaires de niveau Master/Ingénieur (critère 3),
  • personnel support participant aux tâches nécessaires à l’avancée scientifique (critères 2 et 4).

Les exemples fournis dans le Guide servent désormais de référence officielle lors des contrôles. Ils renforcent l’importance de démontrer, pour chaque collaborateur, le lien concret entre son activité et l’avancée technique de l’opération de R&D.