Qu’est-ce que le critère de création ex-nihilo dans le cadre du statut de JEI ?

Création ex-nihilo et statut de JEI : comment être éligible en 2025 ?

Le statut de Jeune Entreprise Innovante (JEI) reste, à ce jour, l’un des dispositifs les plus attractifs pour soutenir les projets de R&D : exonérations sociales sur les salaires des personnels de recherche, avantages fiscaux, image renforcée vis-à-vis des investisseurs, etc.

Mais pour en bénéficier, il ne suffit pas de faire de la R&D. Votre entreprise doit notamment être considérée comme “créée ex-nihilo”, c’est-à-dire réellement nouvelle, et non comme la continuité ou la réorganisation d’une activité existante.

Ce critère est souvent mal compris et parfois très coûteux lorsque l’administration considère qu’il n’est pas rempli.

Pourquoi le critère de création ex-nihilo existe-t-il ?

L’enjeu de l’administration est simple : éviter les montages d’optimisation abusive.

Sans cette règle :

  • Une grande entreprise pourrait créer une série de filiales pour y loger ses activités de R&D et bénéficier massivement des exonérations JEI, alors même que le groupe est déjà mature ;
  • Un entrepreneur pourrait recréer une société tous les 8 ans, transférer les salariés et l’activité dans une nouvelle structure, et prolonger indéfiniment les exonérations sociales.

Dans ces cas, l’esprit du dispositif serait clairement détourné. Le critère de création ex-nihilo est donc une barrière anti-abus : il sert à distinguer une véritable nouvelle entreprise innovante d’une simple restructuration d’activité existante.

 

Une règle qui peut aussi toucher les petites structures

Cette logique anti-abus concerne aussi des entrepreneurs parfaitement de bonne foi.

Par exemple :

  • Créer une nouvelle société pour isoler un vertical métier,
  • Séparer plusieurs pôles d’activité dans des structures différentes,
  • Restructurer un groupe de TPE/PME pour clarifier l’organisation.

Même dans ces situations légitimes, la question qui se posera toujours est :

“La nouvelle structure est-elle vraiment une entreprise nouvelle, ou une prolongation / dédoublement / réorganisation de l’existant ?”

D’où l’importance de bien comprendre la notion de création ex-nihilo avant de créer une nouvelle entité, surtout si vous comptez demander le statut JEI.

 

Qu’est-ce qu’une création ex-nihilo ?

Les commentaires administratifs (BOFiP, notamment BOI-BIC-CHAMP-80-20-20-10) précisent qu’une entreprise éligible au statut de JEI doit être réellement nouvelle.

Concrètement, l’administration va rechercher l’existence de liens avec une entreprise préexistante. Plus ces liens sont forts, plus le risque est grand que la création soit refusée comme ex-nihilo.

 

L’absence de lien d’activité

Votre nouvelle entreprise ne doit pas être :

  • une extension d’activité d’une entreprise déjà existante ;
  • un segment de marché isolé dans une nouvelle structure (verticalisation) ;
  • un simple découpage d’une activité existante dans une autre entité.

Si l’activité, le produit, le service ou le marché sont substantiellement les mêmes, l’administration considérera qu’il ne s’agit pas d’une création ex-nihilo.

 

L’absence de lien commercial

L’administration regarde aussi :

  • les clients (portefeuille commun ou transféré ?)
  • les prospects (mêmes fichiers, mêmes cibles ?)
  • les actions commerciales (marketing partagé, site commun, forces de vente mutualisées, etc.)

Si la nouvelle structure reprend à l’identique ou de façon très proche le réseau commercial d’une société existante, la qualification ex-nihilo est fragilisée.

3.3. L’absence de lien financier

Le lien financier peut se matérialiser, par exemple, par :

  • un actionnariat commun ou croisé (la société existante détient la nouvelle, ou inversement),
  • des financements directs (prêt, apport, avances en compte courant, etc.),
  • une intégration dans un groupe où les flux économiques sont particulièrement imbriqués.

Cela ne signifie pas que toute situation de groupe est impossible, mais plus le lien financier est fort, plus l’administration sera vigilante sur la réalité de la “nouveauté” de l’entreprise.

 

L’absence de lien salarial

Enfin, point très sensible : les salariés.

L’administration vérifie notamment :

  • s’il y a eu transfert de personnel (développeurs, commerciaux, dirigeants, etc.) d’une structure existante vers la nouvelle ;
  • si des salariés sont partagés entre plusieurs sociétés du même périmètre ;
  • si le dirigeant conserve à l’identique ses fonctions sur plusieurs entités liées.

Transférer des équipes entières dans une nouvelle structure pour bénéficier du statut JEI est typiquement ce que la règle ex-nihilo vise à empêcher.

 

Cas particulier : la reprise d’activité

Lorsqu’une jeune entreprise résulte de la reprise d’une activité préexistante (fonds de commerce, branche complète, etc.), le lien avec l’activité antérieure est, par définition, très fort.

Dans ce cas, sauf exception très particulière, l’administration considérera que la société n’a pas été créée ex-nihilo et ne peut donc pas bénéficier du statut de JEI.

 

Comment le critère ex-nihilo intervient-il dans le rescrit JEI ?

Le rescrit JEI reste le meilleur moyen de sécuriser votre situation.

Lors du dépôt de votre demande, l’administration vous demandera de détailler :

  • l’historique de votre projet,
  • vos liens éventuels avec d’autres structures (activité, capital, clients, salariés…),
  • la composition des équipes, notamment celles affectées à la R&D,
  • la nature des financements et des moyens partagés (locaux, matériel, licences…).

Sur cette base, elle appréciera si votre entreprise peut être qualifiée de créée ex-nihilo et, plus largement, si vous remplissez l’ensemble des critères JEI.

 

En résumé

  • Le critère de création ex-nihilo reste central pour bénéficier du statut JEI.
  • Il vise à distinguer une vraie nouvelle entreprise innovante d’une simple reprise ou extension d’activité.
  • L’administration analyse les liens d’activité, commerciaux, financiers et salariaux avec les structures existantes.
  • Une bonne stratégie de segmentation ou de structuration de groupe doit être pensée en intégrant dès le départ ces contraintes.
  • En cas de projet de nouvelle société ou de réorganisation, le rescrit JEI et l’accompagnement d’un spécialiste permettent d’éviter des erreurs parfois très coûteuses.